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Sanza lettere

par Marie Cosnay

Course-poursuite énigmatique

Un basculement intime se produit au moment d’un basculement politique. La narratrice prend la route, rencontre des réfugiés dans une forêt de l’Aude, un voleur de bateau en Méditerranée, une infirmière peu conforme et des squatteurs à Besançon. C’est ça : la narratrice tente de se frotter au monde, de le rencontrer – mais voilà, cela semble vain. Restent les étapes nommées, les Gertrude Stein, Dashiell Hammet, Pere Gimferrer, Jean-Patrick Manchette et Virgile. C’est un road movie, une fuite… Une fille, la narratrice a bel et bien l’impression qu’elle fuit un crime qu’elle a commis et oublié, un corps gît au centre d’une pièce.

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Extrait :

on avait perdu un mot dans les sous-sols, impossible de traverser, le couloir retient toute une généalogie, les uns piétinent les autres dans un espace qui ne s’élargit pas sous la pression des corps, prenant appui sur les genoux et les fesses on cherche l’air en surface cogne au plafond et de corps en corps va jusqu’à ma mort Elle est venue ma mort je ne dis pas ça à cause d’un printemps mais après un trop plein de printemps, de saisons, après une impression sordide, un changement de genre et de cap Transformons les corps entassés dans le hall en lettres Évaporons-nous en récits disais-je Passons par le trou de la serrure mais personne n’y arrivait

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d’autant que le désir de liberté lui-même mourait ; m’agrippant je cherchais dans le hall une idée pour survivre ; il semblait plus que tout autre chose dégueulasse mon élan de survivre ; je m’agrippais à la dégueulasserie c’est-à-dire que malgré la mort qui me fonçait dessus je tenais les rênes

j’avais dans l’idée une mort parfaite parfaitement déboîtée. Tout ce qu’on n’imagine pas couler comme humeurs sur un sol de briquettes rouges coulait et collait, parfait. Je luttais c’est bien ça et pas un fichu poète pour m’aider à récupérer le tout, le porter une fois de plus, le tout, avec des mots du genre : tu vas voir comment ça se passe comment c’est doux et triste mais triste d’une façon attachante, de revenir à vivre

pour ce qui est de la sexualité j’ai été débordée, contre un miroir j’ai jeté mon verre puis quelqu’un gisait féminin sur le sol de briquettes bras en croix le sang en jet puissant surgissait de la blessure au front grosse comme une pièce de vingt centimes, on aurait dit le trou d’une balle, je ne me suis pas retournée, la Peugeot Faut qu’elle roule avait dit Delphine, il est 6 heures du matin et je roule en morte que je suis

(le tombeau était magnifique, de marbre et labyrinthique, chaque pièce doublée d’une autre attenante et semblable quoique grise quand l’autre lumineuse)

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Critiques :Tristan Hordé dans CCP 31-5 a écrit:

Il y a dans l’œuvre de Marie Cosnay une continuité remarquable, au point que chaque livre reprend souvent, discrètement, des détails du précédent.

Joachim Sené dans Remue.net a écrit:

"c’est un road movie et retour, rare forme du genre, comme un circuit automobile, tout en étant drame et donc unités de lieux, il faudrait ajouter le passages aux actes il y a aussi : un chat dédoublé ; un chat seul ou chat mème, un chat miroir sans miroir, comme de Schröndinger, chat et non-chat, sœur et non-sœur, meurtre et pas de meurtre, arme du crime ou pas, les pistes sont quantiques mais la Peugeot est rouge et le livre extraordinaire de concis et de force, de rythme, toute la poésie le berce et trace sa route, avec ces drames antiques qui sont nos nouveaux polars, et l’urgence de tout ça dans cette forme qui prend à la gorge comme autant de plans frénétiques d’un David Lynch sous acide"

Blog dans Litténerante a écrit:

Sanza Lettere, c’est un livre à mi chemin entre roman d’aventure et poésie introspective et militante. L’écriture est très particulière, ce qui demande un effort de lecture pour plonger dans l’histoire, certes, mais lui donne aussi une dimension plus puissante. Le livre est composé en paragraphes, souvent courts et avec très peu de ponctuations, voir aucune. On lit alors d’un seul souffle, avec rapidité, à la manière justement d’un road movie. Au début des paragraphes, pas de majuscule, et à la fin pas de point ; rien ne commence ni ne s’arrête, à la manière d’une longue route que l’on suit et qui revient, peut être, toujours à son point de départ. Des phrases qui n’en sont pas, sans verbe, parfois un mot sans contexte. Mais on prend très vite le fil et il y a une intrigue qui tient notre curiosité nous fait tenir ce rythme endiablé sur les routes.


À propos de l’auteur

Marie Cosnay vit et travaille au pays basque, elle y enseigne le latin, en collège. Traduit Ovide et Virgile, pour le plaisir. Publie des textes sur le site Des aubes particulières, d’autres textes sur le blog Chroniques, sur Médiapart, d’autres encore paraissent dans le journal en ligne Enbata. Tient une rubrique dans la revue Le matricule des anges.

Bibliographie

Aquero, L'Ogre, 2017 • Cordélia la guerre, L'Ogre, 2015 • Sanza lettere, L'Attente, 2015 • A notre humanité, Quidam, 2012 • Des Métamorphoses, Cheyne, 2012 • Comment on expulse, responsabilités en miettes, Éditions du Croquant, 2011 • Des trains à travers la plaines (avec Claude Chambard, Jérôme Lafargue, Éric Pessan), Atelier in8, 2011 • Ovide : d'Orphée à Achille, NOUS, 2011 • L'Allée du bout du monde, Publie.net, 2010 • La Langue maternelle, Cheyne, 2010 • Quand les mots du récit, Publie.net, 2010 • Noces de Mantoue, Laurence Teper, 2009 (Rééd. numérique. - Publie.net, 2012) • Entre chagrin et néant - Audiences d'étrangers, Laurence Teper, 2009 et Cadex, 2011 • André des ombres, Laurence Teper, 2008 (Rééd. numérique. - Publie.net, 2012) • Je ne pourrai pas venir te voir (ouvrage collectif), Vent d'Ouest, 2008 • Les Temps filiaux, Atelier in8, 2008 • Trois meurtres, Cheyne, 2008 • Déplacements, Laurence Teper, 2007 (Rééd. numérique.- Publie.net, 2012) • Le Chemin des amoureux, Le Bruit des autres, 2007 • Villa chagrin, Verdier, 2006 • Adèle, la scène perdue, Cheyne, 2005 • Que s’est-il passé ?, Cheyne, 2003


Le parfum du jour est fraise

par Pascale Petit

Jeu de construction
Avec le soutien du Centre National du Livre

Sont empruntées au fur et à mesure toutes les possibilités du langage pour manipuler son auditoire : l’affirmation, la démonstration, l’insinuation, la menace, la prédiction, la litanie, la répétition, la contradiction masquée, le non-sens. L’exagération, l’exacerbation, l’emballement de tous ces moyens constituent une façon d’augmenter la pression, de poser aussi la question du langage et de retourner tous ces discours contre eux-mêmes ou ceux qui les emploient. On reconnaît ainsi tout au long du texte les formes de discours du côté où la parole est pervertie – discours politiques, discours des sectes, slogans publicitaires, paroles spirituelles ou de coach – où la réalité est prise chaque fois sous le prisme selon auquel on entend la déformer. Pour notre plus grand bonheur possible dans le meilleur des mondes possibles…

Avec le soutien du Centre National du Livre

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Extrait :

Vous devez dès le début veiller à faire une bonne impression. Aucune attitude ne pourra être prise comme modèle mais vous observerez avec avantage que le geste suit la pensée et que la pensée suit la respiration. Apprenez à économiser votre air, à maîtriser votre souffle. Si vous respirez en ouvrant la bouche, dites quelque chose. Oui. N’hésitez pas à verbaliser certaines des tâches et des actions que vous êtes en train de réaliser. Parlez en respirant correctement : une main sur l’abdomen, l’autre sur la poitrine, vous inspirez. Vous inspirez trois secondes. Vous inspirez trois secondes par le ventre et vous continuez à inspirer trois secondes jusqu’à l’expansion com-plète du thorax. Vous inspirez bien, vous bloquez six secondes puis vous soufflez. Puis vous soufflez.

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Vous soufflez en vidant vos poumons puis votre ventre en contractant na-tu-rel-le-ment les abdominaux en parlant très len-te-ment et en veillant à main-te-nir des pauses entre les phrases. Vous devez être dé-ten-du, vous devez sentir votre corps s’apaiser, vous devez sentir votre respiration super-fluide. Vous devez prendre conscience de l’axe énergétique qui relie le sommet de votre tête à vos talons. L’axe é-ner-gé-tique qui re-lie le som-met de votre tête à vos ta-lons. Conviction / beauté / calme intérieur / pulsations du cœur. Conviction / beauté /calme intérieur / pulsations du cœur. Clarté d’intention / bonheur véritable. Une main sur l’abdomen, l’autre sur la poitrine. L’axe é-ner-gé-tique qui re-lie le som-met de votre tête à vos ta-lons. L’axe é-ner-gé-tique qui. Conviction / beauté / calme intérieur / pulsations du cœur. Clarté d’intention / bonheur véritable. Vous inspirez, vous expirez, vous lâchez la pression, vous lâchez prise pour être totalement détendu. Vous vous sentez mieux. Beaucoup mieux. Grâce à cet exercice, vous vous sentez libre de respirer l’air que vous respirez, libre de penser ce que vous pensez, libre de ressentir ce que vous ressentez, libre de dire ce que vous dites en res-pi-rant pro-fon-dé-ment, vous le dites, oui. Bien sûr, on n’effectue pas ces exercices pour eux-mêmes : on voit plus grand, on s’inscrit en respirant dans un immense champ de forces, dans un immense mouvement de flux et de reflux. Vous inspirez, vous expirez, vous ne cherchez pas à atteindre la performance. Non. Mais vous voyez grand. Vous ex-pi-rez. Oui. Ex-pi-rez. Oui. Oui. Dou-ce-ment. Voilà. Vous pouvez lever les pouces. Tout va bien.

Une attitude négative sera inscrite à votre débit.

Une attitude positive sera inscrite à votre crédit.

Vous souriez : nous sourions. Nous levons le pouce : tout va bien. Yes. We swim. We swim together.

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Critiques :Annetta Riley dans Dalhousie French Studies Revue d'études littéraires du Canada atlantique a écrit:

"Nombreux sont les poètes contemporains talentueux qui créent des poèmes pour prêcher aux convertis – des œuvres qui parlent aux lecteurs chevronnés de poésie qui connaissent déjà sa valeur (aussi peu nombreux qu’ils soient). Rare en revanche, le poète qui puisse effectuer des conversions en faveur de la lecture de la poésie contemporaine parmi ceux qui n’ont jamais creusé ce sol auparavant, qui sont des non-initiés. Savoir ouvrir le monde de la poésie française contemporaine à ces derniers prouve un talent exceptionnel. Pascale Petit a ce talent : sa poésie offre à tous l’occasion de devenir lecteurs de poésie et, ce faisant, d’entrer en rapport avec la poète. Son langage, soigneusement élaboré, nous attire inéluctablement dans des mondes vertigineux où la frontière entre la réalité et la fiction se brouille."

Hugues Robert dans Charybde 27 a écrit:

Construire un village en guise de test et découvrir le conformisme contradictoire de l’efficacité reine.

Véronique Pittolo dans POEZIBAO a écrit:

Ce livre savoureux, acidulé, sucré à la bonne température, nous fait comprendre, décidément, que la poésie peut déborder le poème en se frayant un passage émancipé, entre mode d'emploi et caisse à outils.

Philippe Annocque dans Hublots a écrit:

Commentaire PhA : Ce livre est une tuerie


À propos de l’auteur

Pascale Petit est poète et écrivain. Elle a écrit plus de vingt livres aux genres les plus divers, romans, poèmes, nouvelles et contes. Elle dit être "à la recherche d’une forme personnelle, et travaille à la re-création d’un réel qui aurait subi un décalage – de temps, de lieu, de point de vue". Et dans ce décalage qui crée l’écart, elle joue l’intermédiaire.
"Remarquée par des lecteurs aussi pointus qu’Henri Deluy – qui l’a par deux fois publiée et l’a invitée au comité de rédaction d’Action Poétique – ou par François Bon qui l’a accueillie dans la collection qu’il a dirigée au Seuil, elle est l’auteur de textes aux statuts très différents, mais qui tous cherchent à montrer une réalité décalée." (Gérard Noiret, La Quinzaine littéraire)
Elle chronique également des livres parus pour le Cahier Critique de Poésie publié par le cipM de Marseille.
Par aileurs, elle anime régulièrement des rencontres en milieux scolaires et des ateliers d’écriture (en collaboration avec la maison des Écrivains et de la Littérature, la maison de la Poésie de Saint-Quentin-en-Yvelines, la biennale Internationale des Poètes en Val-de-Marne).

Bibliographie

L’Audace, Éditions Nous, 2019 • I love you mon biniou, L’École des Loisirs, 2018 • Le corbeau et le renard et compagnie, L’École des Loisirs. 2016 • L'équation du nénuphar, Louise Bottu, 2015 • Le parfum du jour est fraise, L'Attente, 2015 (Mise en scène par Christian Lapointe à la Satosphère de Montréal pendant le Festival International de Littérature, 29 septembre 2019) • Per fare il ritratto di un pesce (Illustrations de Maja Celija), Orecchio Acerbo, 2015 • Le douk-douk (théâtre), L'École des Loisirs, 2015 • Pool (illustrations de Renaud Perrin), Rouergue, 2014 • Histoir d’ouf (théâtre), L’École des Loisirs, 2013 • Made in OuLiPo (théâtre), L’École des Loisirs, 2013 • Comment faire avec le rhinocéros (illustrations de Missadline), Rouergue, 2011 • Les Côtés cachés, Action Poétique / BIPVAL, 2011 • Sharawadji - Manuel du jardinier platonique, L’Inventaire, 2010 • Du coq à l’âne (illustrations d’Hervé Tullet), Sarbacane, 2009 • Nous devons attendre que le jour se lève, Publie.net, 2007 • Manière d’entrer dans un cercle & d’en sortir, coll. "Déplacements" dirigée par Bernard Comment et François Bon, Seuil, 2007 • Tu es un bombardier en piqué surdoué, collection de la BIPVAL, Le bleu du ciel, 2006 • Tom II (théâtre), L’École des Loisirs, 2006 • Tom Premier (théâtre), L’École des Loisirs, 2005 • Monsieur Jones (théâtre), L’École des Loisirs, 2005 • L’Homme en question, (Der man um den es geht), Sisyphos (Cologne), 2002 • Salto solo (contes poétiques/Illustrations de Benoît Jacques), L’Inventaire, 2001 • Les Habitants des rêves (illustrations de Marie Loiseau), Grandir, 1999 • La Ligne d’horizon (illustrations de Christophe Hamery), Rouergue, 1997 • Paris-Barcelone (recueil de nouvelles), N & B, 1996


Tant qu’il fera jour

Une histoire américaine

par Keith Waldrop

Couverture d’ouvrage : Tant qu’il fera jour
Fiche technique :Prix : 19,00 € EUR
ISBN : 978-2-36242-053-5
Taille : 15,00 x 21,00 cm
Pages : 260

Roman familial

Né au Kansas en 1932 d’un couple désuni, le jeune Keith part, sous la conduite de leur mère avec ses deux demi-frères et sa demi-sœur, à la recherche de la vraie religion. La famille atterrit en Caroline du Sud dans un college fondamentaliste, où se situent certains épisodes désopilants du livre. Puis la famille se disperse… Leurs retrouvailles sont l’occasion d’impayables séances de spiritisme autour d’une planche de oui-ja, dont les deux demi-frères font un usage effréné. Au-delà de l’anecdote, dans une langue simple et directe, l’auteur nous livre une méditation sur les rapports entre folie et spiritualité, sur la recherche du sens et sur sa perte. Ce roman familial qui se déroule dans l’Amérique des années 40 et 50 est illustré de photos de famille. Comme dans sa poésie, Keith Waldrop écrit avec une sérénité malicieuse sur l’expérience et la mémoire. Ce roman sentimental, burlesque, philosophique, nous en apprend plus sur l’Amérique dite profonde que ne le feraient cent livres de voyageurs pressés.

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Julian dénicha un jeu de oui-ja, dégoûté de l’avoir trouvé au rayon des jouets – c’était avant le Nouvel An. Ça marchait bien avec Charles et Seely ; Charles ricanait quand le bout de ses doigts avançait avec la planchette en mouvement. Ils tentèrent de persuader le juge Jerimy de s’asseoir avec eux, mais il s’y refusa. Ça marchait bien avec Clyde et Elaine, bien qu’ils en eussent peur. Mais ça marchait formidablement quand Julian se tenait d’un côté ou de l’autre de la table. Tous les soirs ils firent parler le jeu. Alors que le sapin de Noël perdait toutes ses aiguilles, ils mirent leur trouvaille à l’épreuve.
« Où sont mes pinces », demanda Clyde, et la réponse s’épela d’elle-même : « D-E-R-R-I-E-R-E-T-E-L-E », et c’est là qu’on les retrouva. Ça ne ratait jamais quand il s’agissait de futilités de ce genre. Mais le test le plus important n’avait rien à voir avec l’efficactié.

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« Êtes-vous le mal ? » demandèrent-ils à brûle-pourpoint.
« J-E-H-A-I-S-L-E-M-A-L », répondit la planche, à leur soulagement. Pendant un temps (quelques semaines, j’imagine), celle-ci donna à Julian des instructions détaillées sur où aller pour faire de bonnes affaires, et (ils étaient alors tous plus ou moins dans les postes de télé) où trouver à bon prix des postes de télévision usagés. Ça ne ratait jamais. Leurs affaires s’améliorèrent. Et puis, un soir, le ton changea.

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Critiques :Sébastien Hoët dans CCP a écrit:

Roman réjouissant que celui-ci...


À propos de l’auteur

Keith Waldrop et son épouse Rosmarie, pendant leurs années d’études à l’Université du Michigan, fondent la revue Burning Deck. Celle-ci se transforme en maison d’édition, et de nos jours Burning Deck reste l’une des plus en vue dans le monde turbulent de la « petite édition ». Autour des Waldrop s’est constitué un des pôles majeurs de la poésie et de l’activité littéraire aux États-Unis. Au cours des quinze dernières années, K.W. a publié quatorze titres, dont Transcendental Studies (University of California Press, 2009), qui a valu à son auteur le National Book Award pour la poésie. Il est également un traducteur de premier ordre de poésie française contemporaine, et il a publié de remarquables versions des Fleurs du mal et du Spleen de Paris, de Baudelaire. Son œuvre poétique est également traduite en français, notamment Le vrai sujet, publié chez José Corti en 2010.
Les livres qu’il écrit en commun avec Rosmarie Waldrop seraient l’œuvre d’un « troisième Waldrop », qui n’écrit ni tout à fait comme Keith, ni tout à fait comme Rosmarie.

Bibliographie

En français (livres traduits de l'américain)Tant qu'il fera jour - une histoire américaine, traduit par Paol Keineg, l'Attente, 2015 • L’irrattrapabilité, suivi de Le Maître de la crucifixion de Providence, traduit par Bernard Rival, Théâtre Typographique, 2013 • Naufrage au havre, traduit par Bernard Rival, Contrat main, 2013 • Intervalles, traduit par Alain Cressan, Lnk, 2011 • Le vrai sujet, traduit par Olivier Brossard, José Corti, 2010 • Échos de Mrs. Crowe, traduit par Bernard Rival, Contrat main, 2009 • Pertes inespérées, traduit par Bernard Rival et Bénédicte Vilgrain, Théâtre typographique, 2008 • Taches d’eau, traduit par Paol Keineg, Format Américain, 1997 • Aimer par description, traduit par Françoise de Laroque, Créaphis, 1996 • Une cérémonie qui se passait ailleurs, traduit par Françoise de Laroque, Fourbis, 1990 • Poème de mémoire, traduit par Anne-Marie Albiach, Orange Export, 1982 De Keith & Rosmarie WaldropUn cas sans clef, traduction de Marie Borel et Françoise Valéry, éditions de l’Attente, 2010 • Light Travels, traduit par David Lespiau, éditions de l’Attente, 2006 • Tome un, traduction collective Royaumont et Juliette Valéry, Créaphis (Un bureau sur l'Atlantique), 1997


Elles en chambre

par Juliette Mézenc

Visite guidée

Entre essai et poésie, une continuation, près d’un siècle plus tard, de la réflexion conduite par Virginia Woolf dans son essai « Une chambre à soi », sous la forme d’une visite guidée des chambres de femmes écrivains. Chambres d’écriture imaginées sous la surface, dans des régions dissimulées au regard, obscures, maintenues à part d’un quotidien souvent mené de front. Ou comment allier espace intime et contraintes matérielles d’une façon infiniment subtile pour ménager sa liberté intellectuelle.

Avec également des contributions de Marie Cosnay, Liliane Giraudon, Christine Jeanney, Emmanuelle Pagano, Cécile Portier et Anne Savelli.

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Lecture d'un extrait par l'autrice, avec interventions musicales de Jean Poinsignon

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Extrait :

Dans la chambre d’Hélène Bessette

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Passons dans la chambre suivante
je vous prie
Il suffit de pousser une porte
Oui, absolument
la chambre de Bessette communique avec celle de Sarraute
Sur la porte, voyez, c’est écrit
Les phrases nous trompent car le langage nous impose plus de logique qu’il n’en est souvent dans la vie, et parce que le plus précieux de nous-même est ce qui reste informulé
Pensée à peine pensée #tropisme
(toutes ces phrases-à-peine-des-phrases juste derrière la paroi = toutes ces PAPDP qu’on retient + ces PAPDP qu’on formule sans y penser + ces PAPDP qui frôlent la conscience + etc.)
Mais de ce côté-ci
refermez bien la porte derrière vous svp
ça HURLE (chez Bessette)
Et vous allez loin comme ça, hurle l’éditeur récalcitrant
Parce que : rien qui hurle plus que la pensée à peine pensée
(elle prend tout l’espace)(et la paroi est si mince pour qui n’est pas dupe)
Et si ça hurle c’est aussi peut-être parce que
Levez les yeux mesdames et messieurs
Oui, absolument
Comme dans Terminator
(je vois qu’on a de la culture… C’est bien… ça)
Vous la voyez comme je la vois
C’est bien une plaque d’acier qui s’abaisse à vitesse lente inexorable
À deux mètres now au-dessus de nos têtes #broyage
alors
écrire vite
ÉCRIRE VITE
PLUS VITE

 

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Critiques :Maxime Decout et Estelle Mouton-Rovira dans RELIEF a écrit:

Un grand entretien autour de Elles en chambre

Jean-Philippe Cazier dans Mediapart a écrit:

Elles en chambre, de Juliette Mézenc, interroge les conditions, les processus et les finalités de l’écriture. Mais il ne s’agit pas d’un essai, puisque le livre se situe dans une sorte d’espace nomade et multiple où la réflexion, la rêverie, la fiction, la poésie se rencontrent pour créer un livre et un discours atypiques qui déplacent et débordent les frontières, les limites des êtres, des genres, des langages.

Ainsi, le livre de Juliette Mézenc n’est pas uniquement une réflexion, il est une pratique de ce qui est défini comme la finalité de l’écriture, ou mieux, son mouvement (…)

Elsa Gribinski dans Junk Page a écrit:

(…) Room, en anglais, c’est la chambre, la pièce. C’est aussi l’espace. Avec les mots de Virginia Woolf : « La liberté de penser les choses en elles-mêmes. » De chambre en chambre, la visite des lieux (ceux qui vous entravent, ceux qui vous libèrent) constitue une galerie de portraits en camera subjective. Danielle Steel y joue l’intruse mais introduit aux autres, derrière la surface lisse et vitrée, plus chiffrée que lettrée, sonnante et trébuchante, d’une chick lit au kilomètre et au reflet peu flatteur. Au-delà du miroir, la suite est intime. C’est celle des chambres de Sylvia Plath, tunnels, gouffres, à peine une échappée belle – la ligne de fuite s’achève en fuite de gaz. Celle de Shahrnush Parsipur, de l’Iran à l’exil, d’une prison à l’autre. Celle de Monique Wittig, « guérillère » d’un féminisme qui, en France, eut tôt fait de l’oublier (…)

Olivier Quelier dans grandeursrvitude a écrit:

Elles en chambre est un livre sur les chambres des femmes. Les chambres des femmes écrivains, s’entend, comme une continuation de la célèbre « chambre à soi », de Virginia Woolf, indispensable pièce (physique et mentale) pour s’adonner se donner à l’écriture à la littérature.
Un livre étrange, Elles en chambre, hors genre, ni essai ni roman ni étiquette dont ici l’auteure Juliette Mézenc se fiche éperdument. Lui importent le texte, l’écriture, le dispositif mis en place.

Hors de question pour Juliette Mézenc de « rédiger » quoi que ce soit, mais bien d’écrire : « Rédiger est une façon de formuler sa pensée, une pensée déjà pensée qu’il s’agit de mettre en forme. Très bien. Ecrire, c’est tout autre chose. C’est plutôt une manière de découvrir sa pensée dans et par l’écriture, dans son mouvement, et dans le même temps trouver une langue pour le dire ». (…)


À propos de l’auteur

Juliette Mézenc a grandi dans les montagnes de l’Ardèche, elle vit et écrit dans les Cévennes. Elle travaille régulièrement avec d’autres écrivains et artistes, en particulier Stéphane Gantelet et Cécile Portier. Ses terrains de jeu : l’écriture « entre les genres », la fiction transmédia, la performance et le vidéopoème. Juliette Mézenc mène également de nombreux ateliers d’écriture auprès de publics très variés.
Lire un entretien avec l'autrice

Bibliographie

Cahiers de Bassoléa, L'Attente, 2022 • Journal du brise-lames, Publie.net, 2020 • Des espèces de dissolution, L'Attente, 2019 Laissez-passer, L’Attente, 2016 • Tu écris dans ta tête, in Une chambre à écrire, livre collectif, L’Ire des Marges, 2016Elles en chambre, L’Attente, 2014 • Poreuse, roman, Publie.net, 2012, 2018 • Sujets Sensibles, Publie.net, 2009


Une limonade pour Kafka

par Xavier Person

L'angoisse du critique au moment du poétique
Avec le soutien du Centre National du Livre

Comment écrire pour les coquelicots ? Pourquoi écrire encore aujourd’hui ? Comment écrire sans écrire ? Comment écrire pour ne rien dire ? Que faire de sa maladresse ? Sur des livres de Paul Celan, Hélène Cixous, Emmanuel Hocquard, Hubert Lucot, Claude Royet-Journoud et quelques autres, Une limonade pour Kafka propose des essais d’improvisations critiques. Comme autant de tentatives de marcher sur un fil.

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Extrait :

Des phrases se décomposent au ralenti, juste pressenties, qu’on ne saurait voir exactement, comme au départ des rêves, alors que tout s’évanouit dans des images en déliquescence ou en fuite, défaites aussitôt qu’apparues, dont on suivrait la progression selon des modalités flottantes, des imprécisions floues, comme si on se déplaçait dans une ouate ou si nos yeux se fermaient peu à peu, malgré nous, ne nous donnant plus à voir qu’un brouillard où ne presque plus rien distinguer, où s’avancer encore, imperceptiblement, plongé dans ce que notre sommeil finalement nous dérobe, découvrant des espaces qu’on ne saurait réellement parcourir, devenu à soi-même un personnage mystérieux, reconnu plus tard pour n’être autre que soi-même, évoluant dans un rêve dont on ne se souviendra pas exactement, qu

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on ne saurait réellement voir, dans cette dilution de toutes formes, avec à un moment la très nette sensation de perdre la vue, ressentant comme un poids sur mes paupières, ne distinguant bientôt presque plus rien, avançant sans presque rien pouvoir écrire, dans une obscurité ensuite où simplement toucher un mur, n’ayant plus devant lui que ce mur, n’ayant rien devant lui que ce qu’il ne parvient pas à voir, obstacle muet, opaque matière de ses phrases rendues à leur seule apparition, qu’il est finalement très difficile de percevoir en tant que phrases tant elles glissent, se fondent l’une dans l’autre, sous nos yeux se défont, improbable matière peu à peu constituée, dont on sait la découvrant qu’on ne pourra rien retenir, comme il en est des rêves parfois, s’évanouissant à mesure de leur apparition, percevant bien que de ces phrases il n’est pas nécessaire de se souvenir, non plus qu’il ne serait nécessaire de tenter de définir la couleur d’une matière translucide, se contentant d’en voir ou d’en toucher le volume…

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Critiques :Eric Loret dans Libération a écrit:

Il y a dans la lecture une négation, une impossibilité. Dans l'écriture aussi. L'un et l'autre de ces manques sont productifs, le moteur c'est ce qui n'est pas encore : «J'écris ceci dans mon nouvel appartement où je ne sais pas encore comment vivre. Il fait nuit. Une fenêtre dans la cour s'est éclairée. Je me tiens dans l'obscurité et j'écris ceci en regardant ce que je vais voir apparaître à cette fenêtre, à cette seule fenêtre allumée dans la nuit encore, j'écris ceci en attendant.» Plusieurs textes de ce recueil concernent l'œuvre d'Emmanuel Hocquard, mais il y a aussi Hubert Lucot ou Hélène Cixous. C'est une communauté.

Véronique Pittolo dans Poezibao a écrit:

Il arrive que l’écriture critique soit un échauffement, un exercice pour plus tard, quand l’écriture viendra vraiment, dans une décision de la chose finie, de l’œuvre élaborée. La parole critique précède ou excède le texte littéraire, au lieu d’en être le commentaire (faire valoir, éloge, jugement). Il arrive aussi qu’on ne fasse pas la différence entre l’une et l’autre, que le texte critique ne soit que prétexte à effusion poétique, à discours sur la fiction, dans une boucle, une mise en abîme de la jouissance de l’écriture. Nous voyons ceci dans l’œuvre de Roland Barthes, et dans ce livre attachant de Xavier Person, qui rassemble des textes parus précédemment dans des revues et publications confidentielles.

MARCELLINE ROUX dans Culture Chronique a écrit:

Mes lambeaux d’étoffe ont aimé être mis en abyme et je fais le pari que de nombreux lecteurs éprouveront la même soif de vos pages et pas seulement pour percer le mystère de la limonade !


À propos de l’auteur

Né en 1962, Xavier Person est écrivain et critique. Il a longtemps publié des chroniques littéraires pour la revue Le Matricule des anges. Il a été critique aux Mardis littéraires, puis à l’Atelier littéraire sur France Culture. De 2005 à 2013, il a été membre du comité de rédaction de la revue CCP, cahier critique de poésie du centre international de Poésie de Marseille.
Selon Véronique Pittolo, "Xavier Person souligne [dans ses ouvrages] l’importance de son parcours de lecteur, l’envahissement des livres des autres sur son désir d’écrire. De la difficulté à s’affranchir de ce qu’on a lu, de ce qu’on a aimé. Une lecture intensive peut-elle empêcher de trouver son style ? Comment se débarrasser des références ? […] Souvenirs éclatés, fragments sollicités, égarés, retrouvés, éclairés autrement, la froideur du jugement est reléguée par la puissance du rêve, du passé, de l’impossible retour. Approfondir des idées est moins grand qu’approfondir des réminiscences… L’intelligence ne crée pas, elle ne fait que débrouiller."

Bibliographie

- Une limonade pour Kafka, L'Attente, 2014 - Extravague, Le bleu du ciel, 2009 - Propositions d’activités, Le bleu du ciel, 2007