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Mer et brouillard

par Etel Adnan

Épique non-narratif

La mer : peut-être le symbole littéraire originel, incarnant vie, mort et changement incessant.
Le brouillard : mystérieux, atmosphérique, parfois mortel.
Ce livre d’Etel Adnan, intitulé à partir des éléments qu’il questionne, est une suite de strophes contemplatives et sombres interrogeant la condition humaine contemporaine. Il s’attache aux forces universelles, affrontant les cycles répétitifs les plus tragiques de la nature humaine : le départ, la mort, la guerre, l’amour. Moins expérimental que ses travaux antérieurs, le terme le plus approprié pour qualifier cet ensemble pourrait être « épique non-narratif ». À certains moments, on perçoit des éléments de la pensée zen et de la philosophie classique, avec des critiques de l’impérialisme et de la violence. (Jocelyn Heath)

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Extrait :

Comme Médée, la mer appartient à la mythologie : elle se jette contre ses récifs. Elle bout, elle bout, se contracte dans les ondulations de la lumière, se soulève, pour retomber légère contre le battant des lames. Quand on veut regarder la mer il est souvent préférable de fermer les yeux.

L’Océan est le premier fils du Ciel et de la Terre. Le Temps vient en dernier ; il crache des vagues menaçantes et reprend forme. Une éruption d’un genre particulier. Un fauve.

Le point de départ de l’infini est toujours au centre, là où l’esprit demeure. Derrière une image, il y a l’image. Le Néant est au fonde­ment de l’Être, mis en scène par la poésie qui réunit érotisme et intellect. Il n’est pas la vie, il est vivant.

(Mer, p. 42)

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Critiques :Christian Rosset dans DIACRITIK a écrit:

Grand dossier Etel Adnan


À propos de l’auteur

Née en 1925 à Beyrouth d’une mère grecque et d’un père syrien, Etel Adnan est morte le 14 novembre 2021 à Paris. Elle a étudié la philosophie à la Sorbonne, puis aux États-Unis à Berkeley et Harvard, matière qu’elle a ensuite enseignée au Dominican College de San Rafael (Californie) entre 1958 et 1972. En solidarité avec la guerre d’indépendance en Algérie, résistant à écrire en français, elle s’est tournée vers les arts plastiques. Elle a participé au mouvement des poètes contre la guerre du Vietnam et est devenue selon ses mots « an American poet ».

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De retour à Beyrouth en 1972 et jusqu’en 1976 elle a dirigé les pages culture de deux quotidiens, d’abord Al Safa, puis L’Orient le Jour. Elle a également écrit des textes pour deux documentaires sur la guerre civile au Liban, diffusés à la télévision.
En 1977, son roman Sitt Marie-Rose a été publié aux éditions Des Femmes (Paris) et a reçu le prix “France-Pays Arabes”. Ce livre, devenu un classique de la littérature de guerre (à l’intersection des questions de genre) a été traduit en plus de dix langues. Il a été réédité en 2010 par les éditions Libano-Françaises Tamyras, ainsi que deux autres livres : Au cœur du cœur d'un autre pays (2010), et Paris mis à nu (2011).
Avec sa compagne l’artiste Simone Fattal, Etel Adnan a vécu à Paris jusqu'à sa mort. Polyglotte, elle a écrit en français, anglais ou arabe des livres relevant de tous les genres littéraires : poésie, roman, essai, récit épistolaire, autobiographie… Plusieurs de ses poèmes ont été mis en musique par Gavin Bryars, Henry Threadgill, Tania Leon et Zad Moultaka. Elle a par ailleurs écrit la partie française de l’opéra de Bob Wilson The CIVIL warS, ainsi que plusieurs pièces de théâtre produites à San Francisco, Paris et Düsseldorf.
Également artiste peintre, Etel Adnan expose aux États-Unis, en Europe, en Asie et dans le monde arabe.

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Bibliographie

Déplacer le silence, trad. Françoise Valéry, coll. Philox, L'Attente, 2022 • Voyage, guerre, exil, L’Échoppe, 2020 • Un printemps inattendu, (entretiens), Galerie Lelong, 2020 • Grandir et devenir poète au Liban, L’Échoppe, 2019 • Surgir, trad. Pascal Poyet, coll. Philox, L'Attente, 2019 • Nuit, trad. Françoise Despalles, coll. Philox, L'Attente, 2017 • La vie est un tissage, Galerie Lelong, 2016 • À propos de la fin de l’Empire Ottoman, Galerie Lelong, 2015 • Heiner Müller et Le Tintoret : la fin possible de l’effroi, Galerie Lelong, 2015 • Mer et Brouillard, trad. Jérémy Victor Robert, coll. Philox, L’Attente, 2015 • Le maître de l’éclipse, trad. Martin Richet, Manuella Éditions, 2015 • Le prix que nous ne voulons pas payer pour l’amour, trad. Patrice Cotensin, Galerie Lelong, 2015 • Prémonition, galerie Lelong, 2015 • Écrire dans une langue étrangère, trad. Patrice Cotensin, L’Échoppe, 2014 • Des villes et des femmes, Tamyras, 2014 • Voyage au Mont Tamalpaïs, Manuella Éditions, 2013 Là-bas, trad. Marie Borel & Françoise Valéry, coll. Philox, L’Attente, 2013 • Conversation avec Hans Ulrich Obrist, Manuella Éditions, 2012 • Le Cycle des Tilleuls, trad. Martin Richet, Al Manar, 2012 • Paris mis à nu, trad. Martin Richet, Tamyras, 2011 • Au cœur du cœur d’un autre pays, traduction Éric Giraud, Tamyras, 2010 • À deux heures de l’après-midi, édition bilingue (français-arabe), Tunis, Tawbad, 2010 • Retour de Londres, édition bilingue (français-arabe), Tunis, Tawbad, 2010 • Ce ciel qui n’est pas, poésie, édition bilingue (français-arabe), illustrations (encres) Maya Le Meur, Tunis, Tawbad, 2008 • Le 27 octobre 2003, édition quadrilingue (français-anglais-arabe-japonais), Tunis, Tawbad, 2008 • Vendredi 25 mars à 16 heures, édition bilingue (français-arabe), Tunis, Tawbad, 2007 • Jennine, avec rachid Koraïchi, collection Combats, Al Manar, 2004 • Ce ciel qui n’est pas, Poésie, Paris, L’Harmattan, 1997 • Rachid Korachi : Écriture passion, avec Rachid Korachi et Jamel-Eddine Bencheikh, Alger, galerie Mhamed Issiakhem, 1988 • L’Apocalypse arabe, Paris, éditions Papyrus, 1980, réédition L’Harmattan, 2010 • Sitt Marie Rose, Paris, Des Femmes, 1978 ; réédition Tamyras, 2010 • Jbu : Suivi de l’Express Beyrouth enfer, Paris, P.-J. Oswald, 1973


Parfois, je dessine dans mon carnet

par Éric Pessan

Couverture d’ouvrage : Parfois, je dessine dans mon carnet
Fiche technique :Prix : 22,50 € EUR
ISBN : 978-2-36242-060-3
Taille : 22,00 x 17,00 cm
Pages : 256
Appartient à la collection Au trait :

Journal dessiné

"Quand il n’écrit pas, l’écrivain prend des trains qui arrivent en retard, rencontre des élèves qui rêvent à autre chose, se rend dans des foires du livre où personne ne le reconnaît, passe ses journées à attendre un improbable lecteur dans une librairie, écoute les doléances de ceux qui n’aiment pas lire, se rue sur les buffets, et garde – paradoxalement – l’espoir en la littérature." (E. Pessan)
Auteur prolixe de romans, pièces de théâtre, romans jeunesse, poésie, Éric Pessan sort un nouvel atout de sa manche avec ce journal dessiné, relatant les multiples détails qui font les hauts et les bas de la vie d’un écrivain aujourd’hui. Chaque dessin est assorti d’une phrase.
Troisième titre de notre collection « Au trait » – qui s’intéresse au dessin – c’est un format généreux qui offre plus de 250 pages de dessins. La lecture peut être linéaire, les dessins étant présentés dans l’ordre dans lequel ils ont été dessinés par l’auteur au quotidien pendant deux années, chaque double page formant comme un strip de quatre cases. Elle peut aussi se faire butineuse, au gré du hasard de l’ouverture des pages…

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Extrait :

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Critiques :Hervé Laurent dans CCP 31-4 a écrit:

La saveur singulière de ces notations assez souvent déprimées, la drôlerie qui en atténue l’amertume et récupère in extremis la larme en clin d’œil, vient du dessin. Pessan s’amuse à y littéraliser les métaphores en leur donnant corps avec un humour plein d’inventivité.


À propos de l’auteur

Photo © Mélio Pessan

Né en 1970, Éric Pessan est écrivain et dramaturge, il écrit des romans, de la poésie, des récits, des textes pour la jeunesse, du théâtre, des fictions radiophoniques. Passionné d’espace, il collabore depuis 15 ans avec l’Observatoire de l’Espace, le laboratoire culturel du Centre National d’Etudes Spatiales. Il est l’auteur d’une cinquantaine d’ouvrages où il explore ce qui le questionne, l’effraie, le scandalise ou – au contraire – lui donne la force d’avancer.
Il est membre du comité de rédaction de la web revue remue.net et de la revue Espace(s) éditée par l'observatoire de l'Espace (centre national d'Études Spatiales).
Prix NRP (Nouvelle Revue Pédagogique) de littérature jeunesse pour son roman Aussi loin que possible en 2015.
Grand Prix SGDL (Société des gens de lettres) du roman Jeunesse pour Dans la forêt de Hokkaido en 2018.

Bibliographie

Untoten, L'Attente, 2023 • Le long des fissures (avec Patricia Cartereau), l’Atelier contemporain, 2023 • Samedi (avec Christian de Massy), Patayo, 2022 • Qui verrait la Terre de loin, Fayard, 2022 • Rien dans mon enfance, L’Œil ébloui, 2022 • Le Poème de Fernando, Thierry Magnier, 2022 • Dino et la fin d'un monde, L’École des loisirs, 2021 • Teenage Riot (avec Olivier de Solminihac), L'École des loisirs, 2021 • La Gueule-du-Loup, L'École des loisirs, 2021 • Tenir debout dans la nuit, L’École des loisirs, 2020 • … ou bien, je me trompe ?, N'a qu'1 Œil, 2020 • Biji (livre aléatoire numérique), La Marelle, 2020 • Photos de famille, L’Œil ébloui, 2020 • L’homme qui voulait rentrer chez lui, L’École des loisirs, 2019 • La connaissance et l'extase, L'Attente 2018 • Quichotte, autoportrait chevaleresque, Fayard, 2018 • De si beaux uniformes, Espaces 34, 2018 • Un chagrin d’amour avec le monde entier (avec Virginie Sauvageon), Le Chemin de fer, 2017 • Dans la forêt de Hokkaido, l’École des loisirs, 2017 (Grand Prix SGDL Jeunesse) • Pebbleboy, l’École des loisirs, 2017 • La plus grande peur de ma vie, l’École des loisirs, 2017 • La Nuit du second tour, Albin Michel, 2017 • Lettre ouverte au banquier séquestré dans ma cave depuis plusieurs semaines, Éditions Le Réalgar, 2016 • Sang des glaciers, La Passe du vent, 2016 • Parfois, je dessine dans mon carnet, L'Attente, 2015 • En voie de disparition (essai), Al Dante, 2015 • La hante (avec Patricia Cartereau), L’atelier contemporain, 2015 • Aussi loin que possible (roman jeunesse), l’École des loisirs, 2015 • Cache-cache (théâtre), l’Ecole des loisirs, 2015 • Le démon avance toujours en ligne droite, Albin Michel, 2015 • Demande de remboursement des livres pour cause de non-conformité avec ce que l'on peut attendre de la littérature (hors commerce), L'Attente, 2014 • La fille aux loups (avec Frédéric Khodja), Le Chemin de fer, 2014 • Le syndrome Shéhérazade, L'Attente, 2014 • Et les lumières dansaient dans le ciel (roman jeunesse), L’École des Loisirs, 2014 • Muette, Albin Michel, 2013 • Ôter les masques, essai sur Shining de Stephen King, Cécile Defaut, 2012 • N (avec Mikaël Lafontan), Les Inaperçus, 2012 • Plus haut que les oiseaux (roman jeunesse), L’École des Loisirs, 2012 • Quelque chose de merveilleux et d'effrayant, roman jeunesse, avec Quentin Bertoux, Thierry Magnier, 2012 • Monde profond, L'atelier In-8, 2012 • Dépouilles, roman-théâtre, L'Attente, 2011 • La grande décharge, théâtre, L’Amandier, 2011 • Sexie conférencière, Derrière la salle de bains, 2011 • Croiser les méduses, L'atelier In-8, 2011 • Incident de personne, roman, Albin Michel, 2010 • Moi, je suis quand même passé, poésie, Cousu Main, 2010 • Tout doit disparaître, théâtre, Théâtre Ouvert, 2010 • La nuit de la comète, nouvelles, Cénomane, 2009 • Cela n’arrivera jamais, roman, coll. "Fiction & Cie",Seuil,  2007 • Une très très vilaine chose, roman, Robert Laffont, 2006 • Les géocroiseurs, roman, La Différence, 2004 • Chambre avec Gisant, roman, La Différence, 2002 • L’effacement du monde, roman, La Différence, 2001 réédition en poche (collection Minos-2004) /// Fictions radiophoniques La grande décharge (2011, France Culture) • La plus heureuse entre toutes les mères (2009, France Culture) - La grande enseigne (2008, France Culture) • Dépouilles (extraits) (2006, France Culture) • Demain matin, la lune (2005, France Culture) • Seuls mes yeux (2005, France Culture) • Le syndrome de Münchhausen (2004, France Culture) • La Signature (2003, France Culture)


Poèmes évidents

par Guy Bennett

Couverture d’ouvrage : Poèmes évidents
Fiche technique :Prix : 12,50 € EUR
ISBN : 978-2-36242-058-0
Taille : 12,00 x 16,50 cm
Pages : 132

Comme son titre l'indique

Les Poèmes évidents ont été écrits dans les derniers mois de la présidence de George W. Bush, et ont été inspirés par les « guerres culturelles » qui caractérisèrent la campagne électorale présidentielle américaine de 2008. Ils imitent la langue et le niveau du discours politique américain de l’époque tel que reflété par les grands médias, et surlignent certains des principes centraux du mouvement « tea party » ascendant (anti-intellectualisme, chauvinisme, islamophobie, patriotisme, racisme, xénophobie) qui se trouvaient alors au centre des débats. Les poèmes ont donc été intentionnellement « nivelés par le bas », dans leur sujet, leur approche rhétorique, et leur style, de manière à être compréhensibles, évidents, en fait, même pour le lecteur le plus anti-érudit.

Parution :
Traducteurs :
Thématiques :
Extrait :

Poème anti-intellectuel

Ce poème est contre l’intellectualisme
sous toutes ses formes.

Il rejette les conclusions
de l’analyse et du raisonnement abstraits,
qui vont souvent à l’encontre du simple bon sens
acquis dès la naissance par la plupart des gens.

Il se méfie extrêmement
de quiconque ou de quoi que ce soit
qui n’est pas immédiatement et clairement
compréhensible
et reste sur ses gardes quant aux explications,
élucidations et démonstrations
de toute espèce.

Il préfère la scolarisation à domicile à l’école laïque,
la foi au savoir,
l’opinion à l’évidence,
le divertissement à l’information,
tirer le premier plutôt que poser des questions,
les cowboys aux indiens,
Oprah à l’opéra,
le ketchup au kimchi
et nous à eux.

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Par son égocentrisme inconséquent
et sa suffisance sans fondement,
il s’oppose viscéralement
à tout ce qui n’est pas aussi manifestement évident
que ce poème.

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Critiques :Claro dans Le Clavier Cannibale a écrit:

C'est évidemment jouissif, d'autant plus que l'excès de lisibilité se double d'un petit double-fond qui agit dans l'esprit du lecteur comme un ressort légèrement vicieux, comme si what-you-see n'était pas toujours what-you-got, si vous voyez ce que je veux dire. Mais le fait que le poème devienne le commentateur et l'exemple de ce que son titre énonce/annonce ne relève bien sûr nullement de la potacherie (rappelons d'ailleurs que Bennett a traduit, entre autres, Espitallier, Roubaud, Novarina — c'est donc quelqu'un de sérieux, aussi).

Eric Chevillard dans Le Monde des livres a écrit:

Guy Bennett me semble développer […] deux propositions qui, sans être contradictoires, rendent plus complexe qu’il n’y paraît l’évidence revendiquée. D’une part, en effet, il démontre par l’absurde qu’une langue pauvre n’enfantera jamais que de pauvres idées. […]
Mais, d’autre part, Guy Bennett, s’il dépouille la poésie de toute emphase, de toute éloquence même, s’il la dégrade sous prétexte de lisibilité, s’il la ravale à ces énoncés programmatiques les plus objectifs, ne renonce en rien à ses prérogatives. Nul ptyx pour le coup, dans ces vers, le poète n’a pas même besoin de le préciser. L’absence de ptyx est criante. Et pourtant, un peu à la manière de Duchamp avec ses ready-made, Guy Bennett réaffirme ce privilège du poète qui est de régner par décrets sur le monde.

Alain Nicolas dans L'Humanité a écrit:

Le poète américain propose un ensemble de textes qui s’imposent par une simplicité non feinte et induisent une réflexion sur la poésie qu’on pourrait avec un peu de malice rattacher à Queneau

Philippe Annocque dans Hublots a écrit:

Je me garderai donc bien d’en faire un commentaire, en disant par exemple à quel point, sous l’apparence d’un texte apparemment dépourvu de tout ce qui aux yeux du lecteur en fait un poème, ce poème parvient à se jouer d’une des principales aspirations d’un poème, à savoir devenir un objet en soi-même. Je ne rajouterai pas que l’objet peut donc être ce quasi-rien, à la fois négation de ce qui fait le poème dans l’horizon d’attente du lecteur (j’éviterai par exemple de faire remarquer qu’il ne reste plus du vers dit libre que Je me garderai donc bien d’en faire un commentaire, en disant par exemple à quel point, sous l’apparence d’un texte apparemment dépourvu de tout ce qui aux yeux du lecteur en fait un poème, ce poème parvient à se jouer d’une des principales aspirations d’un poème, à savoir devenir un objet en soi-même. Je ne rajouterai pas que l’objet peut donc être ce quasi-rien, à la fois négation de ce qui fait le poème dans l’horizon d’attente du lecteur (j’éviterai par exemple de faire remarquer qu’il ne reste plus du vers dit libre que l’extrême pauvreté du récurrent retour à la ligne), et affirmation que l’affirmation de soi-même suffit ; je ne décrirai donc pas ce texte et le livre qu’il introduit comme un énoncé performatif d’auto-affirmation poétique, je ne rajouterai pas qu’il suffit donc finalement que le texte se dise poème, soit rassemblé avec d’autres textes qui pareillement se disent tous poèmes (le mot poème étant en effet présent dans tous les titres du présent recueil), dans un livre qui intitulé Poèmes… s’affirme donc, tout aussi performativement lui aussi, comme un recueil de poèmes, la poésie y étant ainsi réduite à l’affirmation d’elle-même.

Jean-Pascal Dubost dans CCP 31-4 a écrit:

En leur extrême lisibilité, les poèmes sont des petites installations d’objets-mots qui, parfois, frisent l’absurde du nonsense ; on se demande s’ils ne sont pas la critique d’un appauvrissement du langage ; mais sont de jouissifs instants de lecture.

Fabrice Thumerel dans Libcritik a écrit:

… Guy Bennett déconstruit le mythe du Poète, tourne en dérision les travers de l'auteur comme du lecteur, dont la relation peut être synthétisée par le couple antinomique narcissisme / voyeurisme.
… on découvre dans ce livre iconoclaste tout l’espace des possibles contemporain. Ses courants : textualisme / lyrisme, poésie visuelle, poésie à contraintes… L'avant-garde... L'expérimental… Ses modes : le trash, la culture pop... Le poème engagé... Les poncifs textualistes : autoréférentialité, autoréflexivité, autotélisme... Ses pratiques : renvois d’ascenseurs, stratégies diverses… Ironique, le texte dévoile les implicites et subvertit le discours dominant : le tout-marketing... La doxa écologiste… Jouissif !

Christian Rosset dans DIACRITIK a écrit:

Directs, immédiatement accessibles, ces poèmes – “autonomes et auto-suffisants, ne nécessitant ni commentaire critique, ni explication d’aucune sorte pour véhiculer leur sens qui est évident” (Poème préliminaire) – sont souvent drôles, même quand ils font froid dans le dos.


À propos de l’auteur

Guy Bennett est écrivain et traducteur. Il vit à Los Angeles, où il enseigne à Otis College of Art and Design. Remerciements est son quatrième livre traduit et publié en France.
Bibliographie (en français)
Remerciements, traduit de l'américain par Frank Smith et l'auteur, l'Attente, 2021
Œuvres presque accomplies
, traduit de l'américain par Frédéric Forte & l'auteur, l'Attente, 2018
Ce livre, traduit de l'américain par Frédéric Forte & l'auteur, l'Attente, 2017
Poèmes évidents
, traduit de l'américain par Frédéric Forte & l'auteur, l'Attente, 2015


Katrina

Isle de Jean Charles, Louisiane

par Frank Smith

Immersion
Avec le soutien du Centre National du Livre

Sélection Prix des découvreurs 2017

Isle de Jean Charles est une langue de terre située aux confins de la Louisiane. Elle est la première victime d’une érosion côtière qui ronge la région depuis des siècles, décuplée par les effets des tempêtes qui balaient régulièrement le golfe du Mexique. Avec elle, une communauté d’Indiens issus de trois tribus – Biloxi, Chitamacha et Choctaw – coule doucement. Pêcheurs de père en fils, les Indiens d’Isle de Jean Charles ont comme autre particularité de parler partiellement le français des Cajuns, descendants de Français chassés d’Acadie par les Anglais en 1755 et réfugiés en Louisiane. On y va. On y passe, un jour.

Extrait :

Péripéties.
Une terre sans attaches, que tu arpentes, furibond et confus, dans les dérives de la brûlure interne. Est-ce que tu restes un étranger pour toujours ?
Il y a un rectangle de ciel et, fébriles, de menus accords entre vous. Tu ne désavoues jamais les traces qui te conduisent à Jean Charles.
« You know where you are ? » te demande la vendeuse du Nez coupé, une boutique d’artisanat local sur la route de Cocodrie – bijoux, instruments de musique, tenues de peau, pierres rares…
Des fois, tu ne comprends plus.
On est celui qui navigue et qui marche, celui qui grimpe des échafaudages, celui qui est une personne à elle seule. On est Tzvetan Todorov qui écrit La conquête de l’Amérique. On est à l’écoute des proverbes indiens quand ils disent : « On n’est pas un miroir, on est la vérité de toujours. »
C’est quoi une île ?
La question stagne, elle ne se pose déjà plus.

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Laisser dire et faire. C’est une vocation.

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Critiques :Jean-Philippe Cazier dans Mediapart a écrit:

« Un livre indissociablement éthique, poétique et politique »

Yann Perreau dans Les InRockuptibles a écrit:

« Un grand livre sur la disparition d’une communauté »

Christien Désagullier dans Sitaudis a écrit:

« Poésie circonstancielle de temps (présent) et de lieu (ici) »

Jean-Max Méjean dans L'Obs a écrit:

« Ce livre vous marquera à jamais »

Alain Nicolas dans L'Humanité a écrit:

S’en tenir aux faits, explorer et fracturer le langage...

Librairie Charybde dans Charybde 27 a écrit:

Témoignage presque silencieux, poignant et poétique, de confins de Louisiane où la nature et l’appât du gain s’unirent pour détruire une communauté.

Heike Fiedler dans CCP#31-4 a écrit:

Katrina retrace le vécu d’une communauté d’Amérindiens sur l’Isle de Jean Charles aux confins de Louisiane, terre menacée par l’effet d’érosion côtière.

Georges Guillain dans Les découvreurs a écrit:

Me retiennent pourtant et fortement dans ce livre, non seulement le tableau déprimant de notre monde de plus en plus abandonné aux puissances technologiques, matérielles et financières qui le défigurent et en réduisent toujours davantage la belle et giboyeuse diversité humaine et naturelle.

Frédérique Cosnier-Lafage dans Résonance générale a écrit:

Le mouvement du texte est fait de cette tension entre arriver et repartir, de ce frôlement comme une rencontre toujours à rejouer, comme la terre apparaît et disparaît parmi les flots, comme les indiens eux-mêmes, après chaque cyclone, quittent les lieux et reviennent ensuite pour reconstruire, inlassablement.

Jean-Philippe Cazier dans DIACRITIK a écrit:

Katrina est un livre nomade, où le nomadisme est central. Un livre des circulations – entre l’enquête, la poésie, le récit. Ce qui importe est le déplacement, la mobilité, selon une logique de la transversalité, de l’agencement. Les langages se juxtaposent, se mélangent : langage objectif d’une description encyclopédique ou d’un dictionnaire, langage subjectif des impressions et états internes ; langage littéraire, langage parlé ; langue anglaise, langue française ; etc. Comme l’eau, qui, dans le livre, circule partout, omniprésente. Comme circule celui qui, dans le livre, ne cesse de se déplacer pour rencontrer les habitants du bayou, accueillir leurs paroles, traverser les paysages au volant d’une voiture de location…

Christine Marcandier dans DIACRITIK a écrit:

Le récit de Frank Smith est une cartographie littéraire et une forme de roman documentaire. La langue de terre qu’est l’Isle de Jean Charles est aussi ce lieu où réel et imaginaire se rejoignent, un espace poétique de déploiement des images comme des cultures — descendants d’Indiens, de Français, sur « cette terre d’ici, plein des années », « on ne doit la vie qu’au hasard et qu’à l’exil ».


À propos de l’auteur

Frank Smith, né en 1968, vit et travaille à Paris. Il est écrivain, poète et réalisateur, vidéaste. Il est représenté par la Galerie Analix Forever, Genève.
Il a longtemps été producteur pour France Culture où il a notamment codirigé l’Atelier de création radiophonique, de 2001 à 2011, et animé l’émission La Poésie n'est pas une solution (été 2012).
Il est par ailleurs éditeur, directeur de la collection ZagZig de livres/CD, qu’il a créée aux éditions Dis Voir en 2008, et dirige avec Antoine Dufeu la revue critique et clinique de poésie, RIP.
Il a collaboré également au journal L'Impossible de Michel Butel, à la revue Mouvement, et a animé le dispositif « Poé/tri » d’entretiens avec des poètes pour la plateforme nonfiction.fr
Depuis Guantanamo, (éd. Le Seuil, 2010) puis Gaza, d’ici-là (Al Dante), Etat de faits et Katrina (L'attente), il inaugure, à partir de documents et d’archives, une série d’« investigations poétiques » en phase avec les conflits majeurs du monde contemporain.
En 2014, aux États-Unis, la traduction de Guantanamo par la poète conceptuelle Vanessa Place, est sacrée meilleur livre de l’année par The Huffington Post : « un livre mutant, errant aux confins de Kafka, Lyotard et WC Williams » selon Avital Ronell.
A paraître : Choeurs politiques, Poème dramatique pour voix (L’attente, automne 2017).
Prochaines réalisations : Le Film de l’impossible, présenté au centre Pompidou dans le cadre du Festival Hors Pistes Production, septembre 2017, et Le Film des Indiens (Hors Pistes 2018, centre Pompidou).
En 2018, Frank Smith présentera une nouvelle exposition à la Galerie Analix Forever : Les Films du monde/68 cinétracts, pour célébrer les 50 ans de mai 1968, et participera à une exposition collective Art & Prison, à Hobart, Tasmanie, en juin (commissariat Barbara Polla).

Bibliographie

Chœurs politiques, l'Attente, 2017 • Fonctions Bartleby, bref traité d’investigations ­poétiques, Le Feu sacré, collection Les feux follets n°2, 2015 • Résolution des faits, Fidel Athelme X, 2015 • KATRINA - Isle de Jean Charles, Louisiane, l'Attente, 2015 • Surplis, Argol, 2015 • Le Film des questions, Plaine Page, 2014 • Guantanamo (tranduit par Vanessa Place, introduction by Mark Sanders, praise by Avital Ronell), Les Figues Press, Los Angeles, 2014 • États de faits, l'Attente, 2013 • Gaza, d’ici-là, Al Dante, 2013 • Guantanamo, Seuil, Collection « Fiction & Cie », 2010 • Dans Los Angeles, Le Bleu du ciel, 2009 • Le cas de le dire, Créaphis, 2007 • Je pense à toi, Les Cygnes, 2004 • Zigzag poésie. Formes et mouvements : l’effervescence, Autrement, 2001 • Poé/tri. 40 voix de poésie contemporaine, Autrement, 2001 • Je @ toi, Olbia, 2001 • Pas, photographies d’Anne-Marie Filaire, Créaphis, 1998


Mémoires des failles

par Philippe Annocque

Images incertaines

Loin de l'autobiographie littéraire qui colmate les fissures de la mémoire, l’auteur se concentre exclusivement sur ses béances. Il accumule les moments inaperçus de son existence, tout entière imbibée de magie et d'injustice. Ce sont comme des photographies intérieures dont l’auteur est le premier surpris, coude à coude avec le lecteur. Ces clichés sont rassemblés en albums qui dessinent une vie entière, de l’enfance à la maturité et à l’entrée dans l’écriture, sans que jamais celui dont le nom est sur la couverture puisse jamais affirmer “J’ai vécu cela”. Des moments perdus dans les failles d’une mémoire poreuse et profondément lézardée.

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Lecture d'un extrait par l'auteur

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Extrait :

Troisième album, sixième pellicule : amphithéâtre.

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Quand l’Université n’est pas en ruines, elle se trouve parfois reléguée au fin fond d’une province anonyme. (Soi-même, avec Murielle, on n’en a plus pour très longtemps, à vivre à Paris.) On retrouve là-bas l’ancien professeur de stylistique, qu’on aimait tant tous deux, et qui n’a rien perdu de sa fougue d’autrefois : debout sur l’estrade, il se désespère du silence général. « Mais enfin, selon vous, qu’est-ce qui est véritablement signifiant, dans le mot avatar ? » L’amphithéâtre entier reste muet. Alors on se résout à intervenir et à donner une définition du mot, aussi précise que possible, ainsi que les détails de son origine sanskrite. (C’est un souvenir de lycée qu’on livre là. Arrêté dans la lecture d’Aurélia par l’apparition soudaine de ce mot, on a fait une petite recherche dans un dictionnaire spécialisé qui citait, à titre d’exemple littéraire, l’extrait même du texte de Nerval par lequel on venait d’être intrigué. Cette coïncidence était déjà, pour soi-même, un peu plus qu’un hasard.)

Cependant ce n’est pas la réponse attendue par le professeur. On le savait, d’ailleurs. Comment répondre à une telle question ? Comment répondre à une question, quelle qu’elle soit ?

Voilà : il suffisait de dire – c’est ce que le professeur déclare – que ce qu’il y a de plus signifiant dans le mot avatar, c’est sa finale, en -ar.

On reste muet, quelque part entre la rêverie et la perplexité.

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Critiques :Hugues dans Charybde27: Le blog a écrit:

Respectant avec une certaine souplesse la chronologie d’une existence à revivre dans ses fragments, discernant mal, à chaque fois, malgré l’aide apportée par la figure tutélaire de Murielle, ce qui ressort du solide, du dur, de l’indéniable, de ce qui renvoie plutôt au doute, à l’incertitude, au déjà-vu fugace et légèrement angoissant, Philippe Annocque égrène les stations d’un chemin de croix paradoxal, où la légèreté se bat pour triompher du réel et de son poids, où l’invention langagière et la métaphore devenue réalité concourent à l’effort dont la lectrice ou le lecteur se régalent, en direct ou en léger différé.

Alexandre Ponsart dans CCP 31-5 a écrit:

Par cet ouvrage, l’auteur nous invite à (re)vivre une vie qui s’étend de l’enfance à l’âge adulte. C’est un livre autobiographique mais dont le contenu n’est pas vérifiable, car comme il est indiqué sur la couverture à aucun moment l’auteur n’a vécu cela.

Frédéric Lacoste dans Le Courrier de Gironde a écrit:

Loin de l'autobiographie littéraire qui colmate les fissures de la mémoire, Annocque se concentre exclusivement sur ses béances.

Mariette dans Fondation La Poste a écrit:

Les librairies naturellement de plus en plus focalisent l’attention. Celle-ci est petite ; à l’angle de deux rues. On est juste sur le seuil, mais le dos tourné vers l’intérieur du magasin : c’est parce qu’on regarde Murielle sur le trottoir ; très agitée à propos d’un sujet qui nous échappe. D’ailleurs c’est à quelqu’un d’autre, voire à elle-même, qu’elle s’adresse, on trouve juste drôle son excessive animation.

Guillaume Contré dans Le Matricule des Anges a écrit:

Mémoires des failles serait donc ainsi – quand bien même il se propose de retracer une vie de l’enfance à l’âge adulte – un anti livre de mémoire ; une forme d’autobiographie où tout serait faux, invérifiable, apocryphe. L’auteur, dès lors, comme il est proposé sur la couverture, ne pourra jamais affirmer « j’ai vécu cela ».
En savoir plus sur http://www.paperblog.fr/7708810/philippe-annocque-memoires-des-failles/#8cXY13qgG6AWC0K4.99

Eric Elliès dans Critiques libres a écrit:

« Mémoires des failles » est une sorte d’OVNI littéraire qui, partant du constat que la somme de nos souvenirs est très inférieure à celle de nos instants vécus, retrace la biographie du narrateur en déroulant l’album-souvenir des moments perdus dans les failles d’une mémoire poreuse et profondément lézardée. Le paradoxe de l'argument est résolu par l’existence d’archives, qui ont enregistré sur pellicule ces moments oubliés, mais que le narrateur peine à décrire car il n’est pas sûr de les avoir vraiment vécus...

Claro dans Le clavier cannibal a écrit:

Mémoires des failles accumule, avec une patience de Petit Poucet, les moments inaperçus de l'existence, tout entière imbibée de magie et d'injustice, et sous couvert d'un ton rêveur, au fil des micro-récits qui composent sa matière mercuriale, impose sa musique entêtante


À propos de l’auteur

Philippe Annocque, dubitatif quant à la mention « Du même auteur » qui commence à accompagner ses livres, répond cependant quand on l’appelle par son nom, par souci de commodité. Ses papiers le disent né en 1963, il veut bien les croire. D’origines variées, animé de passions diverses et hétéroclites, il écrit des livres qui lui ressemblent sans pour autant se ressembler entre eux : disparates et convergents, nés de la question de l’identité.
Il anime à l’occasion des ateliers et des rencontres en milieu scolaire et tient Hublots, un blog littéraire bien connu.

Bibliographie

Les singes rouges, Quidam, 2020 • Seule la nuit tombe dans ses bras, Quidam, 2019 • Elise et Lise, Quidam, 2017 • Pas Liev, Quidam, 2015 • Mémoires des failles, l'Attente, 2015 • Vie des hauts plateaux, Louise Bottu, 2014 • Rien (qu’une affaire de regard), Seuil 2001, rééd. Quidam, 2014 • Monsieur Le Comte au pied de la lettre, Quidam, 2010 • Liquide, Quidam, 2009 • Par temps clair, Melville, 2006 • Chroniques imaginaires de la mort vive, Melville, 2005 /// Recueil de poèmes pour la jeunesseDans mon oreille, illustré par Henri Galeron, Motus (septembre 2013). /// En revue • "Tu", dans L’Anacoluthe n°13, été 2010.