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Œuvres presque accomplies

par Guy Bennett

Couverture d’ouvrage : Œuvres presque accomplies
Fiche technique :Prix : 11,00 € EUR
ISBN : 978-2-36242-077-1
Taille : 12,00 x 16,50 cm
Pages : 118

La forme littéraire du projet en question

"À quoi bon exécuter des projets, demande Baudelaire dans les Petits poëmes en prose, puisque le projet est en lui-même une jouissance suffisante ?"
Passant en revue une série de projets qu’il a conçus mais jamais menés à bien, Guy Bennett démontre la justesse de cette question. Œuvres presque accomplies interroge la notion d’œuvre littéraire de l’intérieur, dans la lignée des Poèmes évidents et de Ce livre, qui l’ont précédé dans la même collection.

Parution :
Traducteurs :
Thématiques :
Extrait :

(p. 30-32)

10.XI 14

Et si, au lieu d’une série ininterrompue de descriptions de projets inaccomplis, cet ouvrage était ponctué d’extraits de certains des manuscrits en question ? On pourrait les faire apparaître selon un algorithme quelconque ou en fonction des besoins du texte, et ils se présenteraient différemment, en plus gros caractères et / ou en noir au blanc, par exemple, ou composés de façon à remplir la page, ou peut-être même sous forme manuscrite, comme s’ils étaient – et ceci pourrait très bien être le cas pour certains – des reproductions de pages de mes carnets de travail. Ce qui pourrait aussi servir à rompre l’uniformité du livre et éventuellement créer un rythme.

 

Poèmes basse rés.

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Une image numérique en basse résolution (ou « basse rés. ») possède moins de pixels et donc moins de détail qu’une image « haute rés. ». Elle peut apparaître pixélisée ou « dentelée » à l’écran, avec des contours rugueux, des régions marbrées en ton continu et un manque global de netteté. Ce recueil voudrait établir un équivalent littéraire à de telles images en explorant les possibilités de l’écriture en basse résolution, dont il pourrait s’approcher de différentes manières :

• De brefs poèmes écrits dans un style ébauché, notationnel. Poèmes de peu de mots qui auraient des contours rugueux et une « barbe de trois jours » (phrases incomplètes, irrégularités grammaticales, une pincée de lolspeak, etc.) On pense au premier Kroutchenykh.
• Les poèmes devraient refléter et célébrer une pensée « d’en bas » dans le choix des thèmes abordés : une fascination pour le vulgaire, pour les personnalités et artéfacts culturels de série B, une fixation sur le « famesque (6) », la peopolisation, le trivial, l’éphémère, etc.
• Le langage devrait se dégrader au cours du recueil, à la manière de ces images dont la qualité se dégrade lorsqu’on les sauvegarde dans des formats de compression avec perte, comme le .jpg. On pourrait parvenir à ce résultat en ouvrant les fichiers des poèmes dans un éditeur de texte et en bricolant le code, altérant ou supprimant certaines chaînes, etc., mais on pourrait aussi bidouiller directement le contenu des poèmes eux-mêmes, enlevant certaines lettres / séquences de lettres et les remplaçant par des espaces afin de concrétiser leur absence, etc., à la manière d’« After Images » de Joan Retallack.

2012

(6). Mot anglais récent (2009) : le fait d’être « célèbre pour sa célébrité ».

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Critiques :Jean-Pascal Dubost dans POEZIBAO a écrit:

Ce livre est une mise en garde contre le sérieux de la littérature ; et un éloge de la velléité ; c’est un livre ouvert à un nombre infini d’interprétations. Doté d’un immense fonds, ce livre est un puits sans fond.

Christian Rosset dans DIACRITIK a écrit:

Œuvres presque accomplies “passe en revue une série de projets que Guy Bennett a conçus mais jamais menés à bien”, de manière différente, mais cependant compatible avec ce qu’Édouard Levé avait tenté quelques années plus tôt avec Œuvres (mais Bénabou, Borges ou Pessoa sont aussi, à leur manière propre, passés par là).


À propos de l’auteur

Guy Bennett est écrivain et traducteur. Il vit à Los Angeles, où il enseigne à Otis College of Art and Design. Remerciements est son quatrième livre traduit et publié en France.
Bibliographie (en français)
Remerciements, traduit de l'américain par Frank Smith et l'auteur, l'Attente, 2021
Œuvres presque accomplies
, traduit de l'américain par Frédéric Forte & l'auteur, l'Attente, 2018
Ce livre, traduit de l'américain par Frédéric Forte & l'auteur, l'Attente, 2017
Poèmes évidents
, traduit de l'américain par Frédéric Forte & l'auteur, l'Attente, 2015


Va te faire foutre – aloha – je t’aime

par Juliana Spahr

Poétique documentaire

Ces poèmes interconnectés explorent la politique identitaire d’Hawaï et la place de l’auteur en tant qu’étrangère ; le “va te faire foutre – aloha – je t’aime” hurlé par le chanteur d’un concert de hardcore ; le mot pidgin “da kine” ; les droits coutumiers à la cueillette ; la rivière Palolo ; les similitudes et différences entre chambres d’hôtel et salles de réunion ; les acrobates d’un spectacle de style Las Vegas à Waikiki ; et le pronom “nous” qui traverse tout le livre, tantôt inclusif, tantôt exclusif, à la fois pluriel, fraternel, amoureux et éminemment singulier. Provocatrice et émouvante, finement rendue dans la traduction de Pascal Poyet, la poésie de Juliana Spahr exige lecture et relecture.

Extrait :

C’est ainsi que nous obtenons et
revendiquons.

Ainsi que nous apprenons et que
nous sommes.

J’ai cette pensée.

La pensée de la table publique.

La pensée du lit privé.

Toute cette histoire de jambe posée
sur une épaule et de l’autre jambe
écartée ou enroulée autour de l’autre
personne, c’est l’amour d’essayer qu’il
n’y en ait pas un meilleur que l’autre.

Les deux ont besoin des rigueurs de
l’autre, des pratiques de l’autre.

Mais je suis désorientée.

 

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Comment faire réunion dans le discours
investi. Faire éloquence. Faire fleuri
dans les deux. Une treille en fer forgé
dans les deux. Un lieu pour accroché
et suspendu par les cheveux dans les
deux. Un lieu pour clignotant rouge
plastique en guise de cœur dans les deux.
Un lieu pour l’amour de la nature dans
les deux. Un lieu pour un jour gris et
humide dans les deux. Un lieu pour
les graffitis intimes tracés dans la buée
sur le miroir de la salle de bain dans les
deux. La façon dans les deux. Le durable
dans les deux. Ensemble. À la fois
gonflement et contact. À la fois écoute
et transformation. À la fois séparation
et union sur toutes les surfaces planes,
dans notre monde du fait quotidien.

/// (pp. 62-63)

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Critiques :Guillaume Contré dans Le matricule des anges (juin 2018) a écrit:

La poésie de l'Américaine Juliana Spahr, telle qu'on peut la lire dans ce volume qui, pour être bref, n'en fait pas moins preuve d'une belle densité, se construit dans un entre-deux qui se joue des définitions. À mi-chemin d'une subjectivité insinuée plutôt qu'affirmée (et pourtant centrale) et d'un ton apparemment docu­mentaire, elle construit d'ambitieuses séries de poèmes aux vers courts. Comme dans toute poésie lorgnant vers un idéal minimaliste (en dire le plus possible avec des matériaux très resserrés pour atteindre un état de suggestion maximale), Juliana Spahr se méfie des effets de manche et reste au plus près d'un vocabulaire simple, quotidien ou technique, des mots dépourvus de toute possibilité métaphorique et qui pourtant la font renaitre en creux (et non parfois sans un certain humour mélancolique). " Nous rêvons d'éloquence " , lit-on, et, dans le même poème, " Nous nous réunissons pour employer des mots comme responsabilité éthique ", mais "Nous limitons la possibilité de l'amour de la parole ". Le livre est parcouru par une oscillation entre le "je" et le "nous", et les deux sont aussi inclusifs (en incluant, par exemple, la subjectivité) qu 'exclusifs : "Je fais partie d'un nous et puis ne fais pas partie d'un nous". Car "Le problème est comment faire nous maintenant tous ensemble". Le long poème "Permutation" met ainsi en parallèle la difficulté de la création d'un discours commun et celle de l'amour et de la sexualité; des gens réunis autour d'une table pour parler, ou dans un lit pour s'accoupler. Ailleurs, elle introduit le mot pidgin "da kine" pour évoquer la question de l'identité à Hawaï. "Dans ce qu'on appelle culture/nous sommes tous doigts et/orteils. Tous jambes et bras". Spahr imagine la construction culturelle sous la forme d'une pyramide humaine élaborée par trois personnages: "Dans ce maintient, nous essayons la/ culture pour voir si elle est utile", car "C'est l 'équilibre qui construit/les pyramides". Une pyramide souvent émouvante, pleine de " Cette folie de l'amour et folie de la pensée ".


À propos de l’auteur

Juliana Spahr, née en 1966 dans l’Ohio, obtient son doctorat en anglais de l’Université d’État de New York à Buffalo. Elle enseigne à l’université publique d’Honolulu, à Hawaï, de 1997 à 2003, et publie la revue indépendante CHAIN avec Jena Osman de 1993 à 2005. Depuis 2003, elle enseigne la poésie au Mills College d’Oakland, en Californie. Elle cultive des fruits, des légumes et des plantes indigènes chez elle à Berkeley, élève son fils né en 2007, écrit des critiques et donne des conférences. Activiste féministe et anticapitaliste, elle participe en 2011 au mouvement Occupy Oakland.

Bibliographie

En français : • Va te faire foutre – aloha – je t'aime, traduit par Pascal Poyet, l'Attente, 2018 • Une armée d'amants, (co-auteur David Buuck) traduit par Philippe Aigrain, publie.net, 2016 • En réponse, traduit par Juliette Valéry, Format Américain, 2000 • L’Incinérateur, traduit collectivement par Vincent Broqua, Emmanuel Hocquard, Abigail Lang, Claude Moureau-Bondy et Juliette Valéry, cipM, coll. « Un bureau sur l’Atlantique », 2010 /// En anglais (USA) : • That Winter the Wolf Came, Commune Editions, 2015 • An Army of Lovers, (coécrit avec David Buuck), City Lights Publishers, 2013 • Well Then There Now, Black Sparrow Press, 2011 • The Transformation, Atelos, 2007 • Things of Each Possible Relation Hashing Against One Another, Palm Press, 2006 • This Connection of Everyone With Lungs, University of California Press, 2005 • Everybody's Autonomy : Connective Reading and Collective Identity, University Alabama Press, 2001 • Fuck You - Aloha - I Love You, Wesleyan, 2001 • Response, Sun and Moon, 1996 /// Éditions • American Women Poets in the 21st Century : Where Lyric Meets Language, (coédité avec Claudia Rankine), Wesleyan, 2002 • Poetry and Pedagogy : The Challenge of the Contemporary, (coédité avec Joan Retallack5), Palgrave Macmillan, 2006 • A Megaphone : Some Enactments, Some Numbers, and Some Essays about the Continued Usefulness of Crotchless-Pants-And-A-Machine-Gun Feminism, Chainlinks, 2011 /// Numéros de la revue Chain co-édités avec Jena Osman • Chain n°12 : Summer 2005, éd. Small Press, 2005 (dernière parution) • Chain n°11: Public Forms, éd. 'A`'A Arts, 2004. • Chain n°10 : translucinacion, éd. 'A`'A Arts, 2003. • Chain n°9 : Dialogue, éd. 'A`'A Arts, 2002. • Chain n°8 : Comics, éd. 'A`'A Arts, 2001. • Chain n°7 : Memoir / Anti-Memoir, éd. 'A`'A Arts, 2000. • Chain n°6 : Letters, éd. 'A`'A Arts, 1999. • Chain n°5 : Different Languages, éd. 'A`'A Arts, 1998. • Chain n°4 : Procedures, éd. 'A`'A Arts, 1997. • Chain n°3 : Part 2. Special Topic: Hybrid Genres / Mixed Media, éd. Chain, 1996. • Chain n°3 : Volume 1 Hybrid Genres Mixed Media Jena Osman Juliana Spahr, éd. Chain, 1996. • Chain n°2 : Documentary, éd Chain, 1995. • Chain n°1 : Special Topic - Gender and Editing, éd. Chain, 1994. /// Prix et distinctions • 2009 : Lauréate du O. B. Hardison Jr. Poetry Prize • 1995 : National Poetry Series, Response


Les enveloppes transparentes

par Dominique Fabre

Couverture d’ouvrage : Les enveloppes transparentes
Fiche technique :Prix : 12,00 € EUR
ISBN : 978-2-36242-072-6
Taille : 13,00 x 19,00 cm
Pages : 88

Rêve à l'encre violette

Dans tous ses livres, pour la plupart des romans, Dominique Fabre a l’art de donner chair à des héros anonymes, les petites gens du quotidien et autres êtres ordinaires. Il déclare : «Ce sont des histoires de gens venus d’ailleurs, des histoires de gens que l’on croise sans se retourner, d’amitiés ébauchées, de voisinage, des histoires d’amour instantané avec les passagères du bus et du tramway, des histoires d’enfants qui grandissent et de vieilles personnes qui meurent...»
En une sorte de rêve éveillé en forme de récit poétique, se dessine une réalité sociale et affective à travers le personnage d’un postier Antillais, dans un monde du travail qui s’embrume et se délite et où certaines enveloppes brillent plus que d’autres…

Parution :
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Extrait :

Je t’ai écrit une lettre à enveloppe
transparente
le postier qui l’a sortie
de la boîte jaune fluo souriait
encore une aujourd’hui
il ne l’a pas rangée avec les autres
il l’a mise là devant
par-dessus la boîte à gants de l’auto de la poste
où sont rangées les choses ampoules feux stop
paquets de chewing-gum entamés vieux
tickets de caisse il a continué sa tournée
le postier Antillais
parfois des poèmes lui retournent de l

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enfance
mais comme tout un chacun se hâte
de les oublier pour conduire son auto
ramasser son courrier cocher les cases
partout où on veut vous en faire cocher
les lettres à enveloppes transparentes
j'en envoyais beaucoup adolescent
puis, j'ai perdu mes pouvoirs magiques
et ils sont revenus là
quelques années avant, quelques années après
va savoir en tout cas l'Antillais
a gardé le sourire
n’a pas commenté sur ces types qui le
klaxonnaient à l’arrêt
parce que son auto jaune fluo leur faisait perdre
5 secondes
de travail salarié et sans doute pour certains
parce qu’il avait la peau noire
il lui restait quelques kilos supplémentaires
de courrier
à ramasser dans les boîtes
mais j’étais la seule lettre à enveloppe transparente
ce jour-là.

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Critiques :Guillaume Lecaplain dans Libération du 06 juillet 2018 a écrit:

«Pour ce qui est de l’écriture je veux de plus en plus m’orienter vers une sorte de pauvreté et de dénuement», écrivait Dominique Fabre à son éditeur à propos de ce nouveau recueil de poèmes. On y retrouve les thèmes de l’auteur de Photos volées (L’Olivier, 2014) : la banlieue, la mélancolie sympa de la routine, les métiers précaires. Les courts textes, sans ponctuation - en effet tout de dénuement - commencent par «Dans le train du soir», «Quelque part», «Parfois», «Un jour». Fabre y décrit la tournée d’un facteur antillais, l’irruption onirique d’enveloppes au papier transparent, et se souvient de lettres reçues, «de ma mère», «d’une fille nommée Angela», «de mon copain Etienne». Le tout est à inscrire dans la lignée des promenades poétiques dans Paris à la suite de Queneau, Roubaud, Jouet ou Réda : «Est arpentée la ville entière / sur le marchepied d’un vieux train / il y a tellement de lumière».


À propos de l’auteur

Dominique Fabre enseigne l’anglais dans un collège parisien. Il est l’auteur de quinze romans et recueils de nouvelles. Son roman «Fantômes» a été distingué par le Prix Marcel Pagnol (Le Serpent à plumes, 2001), et son recueil de nouvelles «Pour une femme de son âge» (Fayard, 2004) par la Bourse Thyde Monnier de la Société des Gens De Lettres. La critique a unanimement salué «J’aimerais revoir Callaghan» (Fayard, 2010) et «Il faudrait s’arracher le cœur» (L’Olivier, 2012).

Bibliographie

Une enfance, L'Attente, 2021 • Aujourd'hui, Fayard, 2021 • Les enveloppes transparentes, L'Attente, 2018 • Le grand détour, avec des photos de Charles Delcourt, Light Motiv, 2017 • Les soirées chez Mathilde, L’Olivier, 2017 • En passant (vite fait) par la montagne, Guérin, 2015 • La mallette, Cénomane, coll. « Mots-manbules », 2014 • Je t’emmènerai danser chez Lavorel, Fayard, 2014 • Photos volées, L’Olivier, 2014 • Des nuages et des tours, L’Olivier, 2013 • Il faudrait s’arracher le cœur, L’Olivier, 2012 • J’aimerais revoir Callaghan, Fayard, 2010 • Avant les monstres, Cadex, 2009 • Les prochaines vacances, Le Chemin de fer, 2008 • J’attends l’extinction des feux, Fayard, 2008 • Les types comme moi, Fayard, 2007 • Le perron, Cadex, 2006 • La serveuse était nouvelle, Fayard, 2005 • Pour une femme de son âge, Fayard, 2003 • Mon quartier, Fayard, 2002 • Fantômes, Le Serpent à plumes, 2001 • Celui qui n’est pas là, Le Serpent à plumes, 1999 • Ma vie d’Edgar, Le Serpent à plumes, 1998 • Moi aussi un jour j’irai loin, Maurice Nadeau 1995, Points 2012


Nous ne sommes pas des héros

par Rémi Checchetto

Portraits de nous

Lors d’une résidence d’écriture dans la Sarthe, Rémi Checchetto écrit des portraits de personnes qu’il rencontre. "Aucun roi parmi eux, nul grand de ce siècle, mais tous les autres. Ceux que l’on n’entend que très peu. Qui sont parfois évoqués par les journalistes, forment des statistiques et autres pourcentages. Les prétendus muets de naissance, les invisibles d’existence…" Soixante-dix-neuf parcours de vie, captés et transcrits en instantanés mobiles par un songeur sensible, un ensemble à facettes ponctué de réflexions sur l’écriture en situation.

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Extrait :

Cédric
ce que c’est que les gardons

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Qu’on ne se trompe pas, au nombre beau grand nombre des choses et autres qui font le monde et défont le monde, sont les choses et autres visibles et les choses et autres pas visibles. Dans le visible du jour d’aujourd’hui de Cédric sont les mathématiques – la table de huit – l’histoire – Jules César qui a une statue en marbre au jardin des Tuileries – la géo – le département de la Sarthe avec ses trois autoroutes l’A11, l’A28 et l’A8. Dans l’invisible du jour d’aujourd’hui, il y a depuis une bonne demi-heure les poissons de la mare. Des gardons. Pas n’importe lesquels ; des gardons qui se gardent de mordre à l’hameçon. C’est que s’ils ignorent que l’abus de tabac est dangereux pour la santé, ils ne sont pas sans savoir que l’hameçon est très dangereux pour la vie, qu’il peut faire passer de vie à trépas sans passage ni par la réanimation ni par l’extrême-onction. Et ça, ça lui fait du bien à Cédric de ne rien pêcher. Être bredouille, c’est justement ne pas remonter à la surface ce qui ne se voit pas et ne s’entend pas. Ça lui fait le vide dans la tête. Et il aime ça, le vide dans la tête. C’est qu’il n’est pas sans ignorer que tout un tas de choses et autres guettent et sont prêtes à surgir. C’est que la tête est comme une mare. Ou comme un désert. Ou comme une salle de classe. Et qu’une espèce de monstre peut surgir. Ou une armée de légionnaires romains. Ou une cohorte de sept fois huit. Et puis de ne pas ramener de gardons pour le repas du soir, ça aussi c’est super bien, comme ça il y aura plutôt du steak haché bien cuit avec juste le sang du ketchup.

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Critiques :Alain Nicolas dans L'Humanité 21 juin 2018 a écrit:

Rémi Checchetto écrit, depuis dix ans, des portraits. Un peu partout où on l’appelle « en résidence », il rencontre des personnes, parle avec eux, se retire pour écrire puis, vingt minutes plus tard, les revoit et leur offre le texte qu’il a écrit. Proposition modeste en apparence, mais dont les effets, lorsqu’ils sont réunis en volume, ne sont pas minces. Ce ne sont pas des « vies minuscules », encore que la référence à Pierre Michon soit très présente, pas des vies exemplaires, pas des vies accomplies, même pas des « tranches » de vie, mais l’effet d’un frôlement de l’écriture par une personne. Ce bougé que la vie a laissé sur la surface immobile de la page, c’est ce qui passe dans ces 80 instantanés d’écriture. Rémi Checchetto atteint ainsi un des buts de la poésie, et ceci quelle que soit la forme d’écriture choisie. Le lecteur n’échappera pas à l’émotion que communique cette galerie de portraits, traces légères du passage des héros, en ceci qu’ils auront échappé, en un instant et pour toujours, à l’effacement. Il y faut beaucoup d’art.


À propos de l’auteur

Poète, Rémi Checchetto a publié de nombreux livres chez plusieurs éditeurs. Lecteur sur scène de son travail il collabore régulièrement avec des musiciens (Titi Robin, Louis Sclavis, Bernard Lubat, Chris Martineau, André-Marc Delcourt, Hélène Breschand…). Dramaturge, il a écrit pour le théâtre des pièces qui ont été mises en scène par Fabien Bergés, Alexia Vidal, Patrick Séreaudie, Bela Czupon, Jean-Marc Bourg, Alexandra Tobelain, Henri Uzureau…

Bibliographie

Tout l'univers, L’Attente, 2022 • Qui sommes-nous, qu’il nous faille cette encre dans le sang ? Script 2021 • Partir, naviguer, arriver et autres constructions pas fatalement intempestives, Lanskine, 2020 • Laissez-moi seul, LansKine, 2018 • Nous ne sommes pas des héros, L’Attente, 2018 • Larsen, Tarabuste, 2017 • Le gué, Dernier télégramme, 2017 • ci même, Tarabuste, 2015 • Boomerang, Potentille, 2016 • Les arbres ne parlent plus oiseau, éditions du Petit Flou, 2016 • Apéro, L’Attente, 2013 • Pas parler parole, L’âne qui butine, 2013 • Que moi, Espaces 34, 2013 • Jours encore après, Tarabuste, 2013 • L'Homme et cetera, Espaces 34, 2012 • Kong mélancolia, Espaces 34, 2011 • Très grand gel, avec les dessins de Shirley Carcassonne, l'Improviste (collection "Un petit siècle épatant"), 2011 • Puisement, Tarabuste, 2010 • Bruissement, ça hésite encore, Script, 2010 • King du ring, Espaces 34, 2009 • Nous, le ciel, L’Attente, 2007 • Une disparition et tout et tout, L’Attente, 2006 • Le monde presque seul, catalogue d’exposition de Mitsuo Shiraishi, 2006 • Valises, Script, 2006 • Là où l’âme se déchire un peu mais pas toute, Inventaire-Invention, 2006 • Confiotes, LAttente, 2005 • Portes, Script, 2003 • P’tit déj, L’Attente, 2003 • Un terrain de vagues, coédition Script et théâtre des Tafurs, 1999 • Manèges, Lucie Lom, 1999


Monomère & Maxiplace

par Véronique Pittolo

Couverture d’ouvrage : Monomère & Maxiplace
Fiche technique :Prix : 11,00 € EUR
ISBN : 978-2-36242-068-9
Taille : 12,00 x 16,50 cm
Pages : 102

Jeu d'archétypes
Avec le soutien du Centre National du Livre

Monomère & Maxiplace interroge la famille à travers une grille ludique (jeu de 7 familles, poker, échecs). L’appartenance à une famille renvoie aussi une familiarité avec des archétypes. Les figures des cartes sont des symboles, fictions ouvertes que l’on peut permuter, décrypter, à l’aune de son propre vécu. Aux schémas issus de la culture populaire (personnages ou héros de contes, de romans), cette autobiographie en “jeu de cartes“ fait revivre des étapes de l’existence entre hasard et décision, destin et libre-arbitre.

Parution :
Thématiques :
Extrait :

Première manche

Hier, j’ai perdu un as, mon 7, mes rouges.

À chaque partie, une quinte.
Je n’avais pas misé d’argent mais mon amour propre.
J’espère gagner aujourd’hui à 10 ou 7 de carreau.

Quand j’étais petite, le pire moment était le dimanche après-midi, on faisait une patience après le repas, puis on allait au musée :
la grande messe, Summer, l’Égypte, les antiquités. Louis XIV en Alexandre.
Dans la tradition, le Roi de trèfle était Alexandre le Grand.
Le Roi de pique, David.
David était petit mais roi.

Le dimanche soir, on regardait Léon Zitrone.
Allongé sur le divan, l’oncle Pierre écoutait le tiercé, un transistor collé à l’oreille (quarté -quinté plus).

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Je viens d’une famille éclatée.
À l’époque, ça ne se faisait pas.
Chacun avait un père, une mère, éventuellement des frères et sœurs
et ça formait une famille.

La famille suffisait au bonheur de l’enfant.

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Critiques :Jean-Philippe Cazier dans DIACRITIK a écrit:

Dans Monomère & Maxiplace, Véronique Pittolo joue à des jeux, ou plutôt joue avec les règles de ces jeux – des jeux de cartes, et essentiellement celui des sept familles. Il ne s’agit pas uniquement de jouer : les règles du jeu et le jeu avec ces règles s’accompagnent de souvenirs, d’un Je qui cherche à se dire à travers ces règles du jeu et le dérèglement de ces règles. Le Je n’est-il qu’un jeu ? N’est-il que les règles d’un certain jeu ? Ou n’est-il que par le dérèglement des règles, leur transformation, leur invention marginale ? Dans les deux cas, il ne s’agit pas du même Je, et c’est leur confrontation, distinction, opposition qui sont aussi à l’œuvre dans ce livre.

Philippe Annocque dans HUBLOTS a écrit:

Le duo Monomère & Maxiplace appartient à la catégorie des Minizup et Matouvu, petits maigres, gros ventres, clown qui appuie sur le nez de son camarade, tire sur l'élastique de son chapeau.


À propos de l’auteur

Née en 1960 à Douai, Véronique Pittolo est écrivain, critique d’art pour la photographie, elle organise également des expositions (elle a participé aux revues Photographies et Beaux-Arts Magazine) et elle anime des ateliers d'écriture.
Elle "pratique une prose poétique qui intègre le narratif, en laissant au lecteur des possibilités d'interprétation. Il s’agit d’un travail sur la fiction qui prend le plus souvent comme point de départ la notion de personnage. Ses livres peuvent se lire comme des propositions qui réveillent quelque chose chez le lecteur, quelque chose qu'il connaît mais qu'il a un peu oublié".

Bibliographie

À la piscine avec Norbert, Seuil, 2021 • Monomère & Maxiplace, l'Attente, 2018 • Une jeune fille dans tout le royaume, L'Attente, 2014 • On sait pourquoi les renards sont roux, Le Temps des cerises, 2012 • Toute Résurrection commence par les pieds, L'Attente, 2012 • La Révolution dans la poche, Al Dante, 2010 • Ralentir Spider, L’Attente, 2008 • Hélène mode d’emploi, Al Dante, 2008 • Danse à l’école, L’Attente, 2006 • Opéra isotherme, Al Dante, 2005 • Gary Cooper ne lisait pas de livres, Al Dante, 2004 • Chaperon Loup Farci, La Main Courante, 2003 • Schrek, L’Attente, 2003 (Épuisé, repris dans l'ensemble "Une jeune fille dans tout le royaume") • XY ou la Poursuite du Bonheur, Cahiers Ephémérides, 1998 • Héros, Al Dante, 1998 • 29 Poètes françaises, Stock, 1995 • Montage, Fourbis, 1992 /// Œuvres radiophoniquesL’homme et le pantin, mise en voix et vidéo sur le site D – Fiction, 2012 • Hélène mode d’emploi, poème sonore pour deux comédiens, France Culture, 2006 • Toute Résurrection commence par les pieds, Perspectives contemporaines, France Culture, 2008 • Peinture-Écriture à l’hôpital, Sur les Docks, France Culture, 2008 • 1789-2009, fiction, France Culture, 2009 Prix de poésie de la SGDL (société des Gens de Lettres) en 2004 Prix Yvan Goll en 2009